Un zeste d’amour par divers détours.


Branle coupé
Des relations personnelles se nouent, se dénouent ou auraient pu germer autour du bal, selon de petits détails dont la perception se fait parfois à retardement et dont la maîtrise n’est pas garantie. L’à-propos, le bon réflexe ne tombent pas toujours à pic ni avec le génie souhaitable. En tout cas pas pour Amato, souvent si pataud et penaud. Mais un jour peut-être…


Elle tient la billetterie à l'entrée du bal et m'assure vivement que je peux avoir une réduction (que je ne demande pas du tout). Je décline son cadeau pour me sentir plus libre de mes critiques tout en soutenant un peu la trésorerie organisatrice. Mais tant d'insistance… ai-je un air si pitoyable d'assisté plutôt que de généreux soutien ?

Elle est assise à côté de moi peu avant le bal. Je la vois sortir de son petit sac à dos deux paires de chaussures, pour s'adapter du mieux au sol de la salle. Très « pro ». J’ai failli l'aborder avec un questionnement involontairement ambigu : "cuir ou caoutchouc, ce soir ?" Risque d'impair évité, je n'ai rien dit. De quoi on se mêle !

Elle avait son prénom dans le titre d'un morceau dansé ensemble un soir. Je m'étais persuadé de le mémoriser aisément ainsi pour surtout ne pas avoir à le lui redemander lors d’un prochain bal. Mais le moment venu… Astrid ? Aurore ? Erica ? Léa ? Dorothée ? Katrinala ? Molly ? Jenny ? Mary ? Carmen ? Louise ? Marianne ? Madeline? Rien à faire. Mes neurones tâtonnent. Encore ouné fois raté.

Elle voudrait m'entraîner dans l’utile deuxième (petit) cercle de délestage de la danse. Avantage : je la retrouverais plusieurs fois durant le mixer. Inconvénient : j'aurais accès à moins de partenaires différentes. Mais je suis réticent à y entrer, car cela démarque trop souvent les "happy few", l’heureuse minorité, la chapelle des très initiés. Je préfère swinger discrètement dans la foule extérieure. Bon, finalement, j’y vais.

Elle m'explique que les danses bretonnes peuvent selon certains échos amener à un état de transe. Le cidre ou le chouchen aidant, admettons. A chacun ses sources d’information et ses expériences de transe en danse. Mes émois à moi, c’est dans d'autres états.

Je me pose depuis longtemps des questions sur les liens existant entre les participants aux bals …

…des couples se forment-ils pour la durée? Des couples s’y défont-ils? Des couples se recomposent-ils entre gens du folk? Des couples s'y rencontrent-ils pour un seul soir après la danse? Ou ne se rejoignent-ils sciemment que pour la danse en y étant totalement exclusifs l’un avec l’autre?

…beaucoup d’enfants ont-ils été conçus suite à une nuit ou une rencontre durable en bal folk? Le cas échéant, cette descendance bien-née a-t-elle souvent un parcours de musicien ou danseur implanté dans le folk? Des danseurs et couples folks sont-ils aussi amateurs de bals populaires, de thés dansants ou de nuits "en boîte" ?

Certains morceaux pourtant magnifiquement joués et dansés recueillent très peu d’applaudissements, c’en est presque gênant. C’est que les danseurs sont encore dans l’émotion intérieure, sous le charme de la situation.

Deux danses de couple en peu de temps avec la même partenaire, ça va, c'est qu'on aime danser ensemble. Mais après trois, bonjour les ébats ? (non, Amato, ici, tu n’es pas en discothèque. Ndlr)

Elle mériterait, quelques secondes après l'avoir aimablement remerciée pour une danse et quittée, que je sorte de ma réserve pour lui clamer le bonheur que j’ai ressenti là avec elle et dont je voudrais lui parler plus longuement. Mais ce n’est ni la coutume, ni le lieu. Et la danse suivante multipartenaires engloutit pour un temps mon élan lyrique.

Elle papillonne et sautille donc un peu plus loin. Ainsi va le bal. La retenue et la patience sont souhaitables et protectrices aussi. Un remerciement appuyé peut si vite être compris comme l'amorce d'une toute autre sorte de déclaration. Fort heureusement. Très justement. Partie remise.

Amato

 

Amato va reprendre de l'élan et rechercher de l'inspiration
pour cette rubrique en vivant de nouvelles tranches
de bal pendant quelques temps.
Que ses nombreux lecteurs (10 000 jusqu’ici) sachent qu'il reste très proche d' Accrofolk et y contribuera encore.