Scénarios, succès et petits soucis

« Tapaçaenbal ?», titrait une cassette du groupe Quintaine dans les années 80. Amato a tout ça en bal, et plus si les lecteurs suivent. Attachez vos ceintures et attention aux décalages.

Folk de salonProbas. Tu abordes et convaincs une partenaire très chouette pour démarrer un mixer, c’est ça de gagné. L’animateur (-trice) explique la suite de pas et de mouvements. Il (elle) ne remet pas les pendules à zéro en revenant aux couples de départ avant que la musique et la danse ne démarrent vraiment. S’il y a beaucoup de danseurs, tu ne reverras pas ta cavalière. Option de précaution, tu la places en position de 2è partenaire présumée du mix. Coup de poker, car tu ne connaissais pas forcément le déroulement à l’avance, vers la gauche ou la droite ?

Le compte est bon. Tu joues en scène et alors que tu n’y faisais pas attention, tu termines le morceau juste au moment où tous ont dansé avec chaque partenaire du mixer. « Chapeau », remarque un danseur admiratif. « Totale maîtrise, c’est tout normal…» peux-tu répondre en frimant avec naturel. En fait, il faudrait y veiller méthodiquement. La maestria finale des chorégraphes trad’, cerise confite sur le cake* (1) des connaisseurs, ce serait même de faire danser le dernier passage avec la première chouette partenaire de ci-dessus, celle que l’on avait invitée ! C’est l’assurance tout risque de la pratiquer au moins une fois.

Le photographe-échotier de presse locale arrive, comme toujours, lors de la seule gavotte ou de l’unique hanter dro du bal. Et le journaleux dissertera comme d’hab’ durant ses 25 lignes de pige sur le fond intemporel de « danses celtiques », les mystères de Brocéliande et sur la jolie charmeuse Nolwenn L. nouvelle Mélusine « tombée toute petite dans la potion Stivell », évidemment. Ce bal-ci est pourtant polyvalent, mi-alsacien, mi-anglo-berrichon-auvergnat-cajun. Si par hasard je suis bien à mon avantage sur la photo, cela pourra compenser l’à peu près journalistique, tout en clichés et poncifs.

Cote. J’ai un top 5, assez stable, des danseuses habituées. Avec de plus un distinguo entre les meilleures et mes préférées. Ce n’est ni convenable ni très politiquement correct, mais c’est ainsi. Alors chut…! Secrets des danses, secret défense. Je précise que ce point de vue ne m’empêche pas de les respecter toutes, quelle que soit leur cote. Même si en général, je l’ai déjà écrit, je ne me lance guère avec les toutes meilleures, sauf si elles me sollicitent : leur grand talent m’inhibe au moment d’inviter. Et dire que je suis peut-être moi-même listé dans un classement semblable tout aussi incongru, fait par d’autres.

Folk de salle des fêtesTrois tours à l’avance en cercle circassien (sur ma gauche) ou en chapelloise (devant moi), je repère avec mon 3è œil quelles variantes pourraient être mises en œuvre lors du swing et de la promenade. Selon ce que je perçois de mes voisines et partenaires immédiates, selon ce que réussit leur cavalier, selon ce qu’elles recherchent ou improvisent, j’avise. Moins de hasards dans les fantaisies n’empêchent pas de menus plantages ni des résultats un peu foireux. Mais l’on apprend aussi comme ça.

La valse à cinq temps est-elle en 2 + 3 ou en 3 + 2 ? Je ne saurai jamais. Je dois piétiner et rétropédaler au jugé durant les premières mesures, avant de trouver l’unisson de ma partenaire. Mais c’est un faux problème vite réglé « à l’oreille » quand les musiciens jouent avec clarté et marquent bien la cadence. La question d’origine, c’est comme pour le capitaine Haddock, de savoir si on dort la barbe au-dessus ou en dessous de la couverture.

Petits bobos. Je connais deux danseuses trop sensibles aux tours très vifs en couple, source pour elles de vertige et de malaise… Une autre a une hanche problématique, mais seulement sur certaines danses bretonnes. Une autre encore, on ne doit pas lui prendre la main droite (je ne sais plus pourquoi), le branle en devient virtuel. Et enfin, cette mémorable amnésique du geste, à qui il faut faire un briefing avant chaque danse pour qu’elle se repère et parfois même un coaching pendant la danse pour la relancer.Toutes sont pourtant de bonnes danseuses. Ah, oui, ce sont peut-être en fait des excuses pour m’éviter…

Gros Bo-bos. Je rêvasse d’un bal folk looké «bobo-bourge », où les participants viendraient sapés comme au bal de la Préfecture, en costard-cravate de marque et robes griffées, décalage total. Ah, une mazurka en tailleurs façon Chanel métissés Dior, des tarentelles en costumes Armani mâtinés de Versace, des valses écossaises en kilts Gaultier, avec tous les parfums et accessoires en rapport, souliers vernis, champagne petits fours, bourrées carrées Hermès et carnets de bal Filofax. Ah, là, je me réveille d’un coup, Carnets de bal* (2), c’est bien du folk trad’. Ouf ! Des Birk’ et des Doc’, du mauve, des dentelles et des volants, du patchouli, du lin bio et de l’écru, (du vin bio et du lait cru, o.k, ça aussi), des jeans/tee-shirts et des marcels. Et pourtant…

Amato

(A suivre…)

 

*(1) en passant, je signale que le cake-walk fut une danse et un spectacle nord-américain de la fin du XIXe. Voir sur You Tube, plusieurs clips é-ton-nants.

*(2) c’est une association folk haut-rhinoise (fameuse).