- - Les fous rebonds d'Amato --

 

Amato lit et relit les réponses des musiciens parvenues à AccroFolk. Puis il décale son regard, vagabonde avec ses propres sentiments et explications, résume, brode ou développe autour des apports d'origine. Syncopes, contretemps, digressions et variations, précisions, dissonances, mais sans croche-pied, impair ni désaccord. A vous de juger.

En complément à ces rebonds, certaines réponses le titillent et le poussent à s'exprimer sur tel ou tel point. Ces ajouts plus personnels sont présentés en rouge foncé.

 

"Bal en Colombie", Fernando BoteroAu n° Zorro bis : trouver la voix (rép.10)
Il recherche une voix de Stentor, mais pour annoncer des morceaux calmes. Il rejette « Black Nag », une country dance (de Playford, auteur anglais de la période baroque) qui ne l'emballe pas.
Il aime déceler certains vrais faux standards qu'il apprécie en connaisseur. Et pourvu que souvent ça rigole, avec spontanéité, mais sans tapage.

Quest. 14 et 16 J’aime bien "Black nag" et l’ai transmuté en bonne vieille chapelloise baroque n' roll secouante.
En vérifiant le sens de son titre, j'ai retrouvé le « noir canasson » Mais un texte de Jacob Grimm (l’un des frères collecteurs/rédacteurs du Petit Chaperon Rouge etc…) indique que dans la mythologie teutonique, on associait ce cheval noir à la libellule, une des diverses montures présumées du démon. La « libellule du diable », donc !! Bon, de là à te faire aimer davantage ce morceau…

 

A Modeste A.Nonyme : ici et maintenant, pourtant (rép.11)
Elle supporte mal le bruit de mauvais microphones à piètre retour dans ses oreilles d' agoraphobe, car cela n'atténue pas hélas son angoisse de l'erreur, du trou de mémoire, des fausses notes.
Elle sait que jouer de la musique demande du temps et du travail qui épanouissent le talent, le don. Elle déplore que ce soit un privilège d'acquérir une bonne formation musicale. Et naître en Berry ou en Morvan lui paraît plus propice pour aborder le folk régional et vivant qu'elle aime.

Quest. 15 Le «privilège» de pouvoir jouer joliment et utilement en public, y compris à un niveau modeste, reste une des originalités fortes du folk. Le bagage d'une éducation musicale complète et éventuellement coûteuse n'y est pas forcément indispensable, même s'il est souvent facilitant. Il faut absolument pour cette raison aussi continuer à pratiquer sans modération, dès ta présente vie.

 

A Denis, du groupe « Coriandre » : heu-reux, donc, danse (rép.9)
Il espère la convivencia, jusqu'à la coda, aimerait faire danser les papés occitans et les jeunes gens de partout. Il sait partager une énergie qui circule en bal avec les couleurs d'instruments à peine grinçants, mais généreux dans l'inventivité. Et avec le rêve pour moteur musical boulimique ! Et avec du mélisme* pour ornement, cela s'écoute, cela envoûte comme un Kyrie grégorien.

* Quest. 19 N B. En musique, le mélisme est une technique consistant à charger de nombreuses notes une syllabe d'un texte, lorsque celui-ci est chanté. Cette musique est opposée à la syllabique, dans laquelle chaque syllabe du texte est fondue dans une seule note. Merci Denis, merci Wikipédia.

 

A Nikita : du beau, du bon (rép.8)
Le bal est une fête, faites plus de bals. Ni cours à donner, ni leçons à recevoir à ce moment, mais toute la beauté du jeu et du mouvement, il recherche le plaisir de l'improvisation bien menée sur scène et sur le parquet.
Avec une bonne sono, quand toute la salle danse, difficile qu'il s'arrête.

Quest. 27 Aidons-nous les uns les autres. Une remarque d'humble bon sens : pour éviter qu'une bourrée ne soit malencontreusement démarrée en valse par des danseurs (ou un en dro en scottish ou un cercle en chapelloise etc…), il est naturellement recommandable que les musiciens l'annoncent auparavant, en précisant si possible de quel type de bourrée, de valse etc… il s'agit ! Ah, ok, mais si la sono est pourrie, basta, le danseur ne comprendra pas.

 

A Sylvain d’Alsace, promeneur solidaire (rép.6)
« Nul en solfège » (dit-il), et (donc ?) très fondamentalement folkeux, il est en tout cas observateur compétent, conseiller très à l’écoute et très convaincant : « Moins de notes, moins vite et moins fort, c’est plus de meilleure musique et plus longtemps». Musicien chantant et chanteur musicien, son empire des sons est de jouer en mouvement au milieu de l’hanter dro en particulier.

 

A Sylvain Tatondiato (Fr.-Comté), compositeur-interprète (rép.3) :
Composer, interpréter, faire fredonner, rassembler, faire connaître, reconnaître et être reconnu, partager. Bonheur et plénitude quand les infatigables "bisseurs" lui font encore et encore jouer les prolongations avec des danses additionnelles en acoustique « off » et « after » au bas de l’estrade. Oubliée la fatigue.
Une musique de film à composer ?! Je te souhaite un Grammy* de la bande-son dans la décennie qui commence.

[* les Grammy Awards sont les distinctions musicales nord-américaines, dont l'appellation fusionne "gramophone" et "grand-maman"]

 

A Gérard, génération spontanée (rép.7)
Il prend soin de la place des débutants et de leur intégration sur scène et en salle. Il aime parler avec le public. Il prône la sobriété du jeu musical. Il entend et suit l’appel des grands horizons lointains chers aux enracinés régionaux. Avec un répertoire simple, maîtrisé et efficace, bien des frontières sont franchies ou abolies pour lui. Stoïque comme un philosophe antique, attentif à tout comme un régisseur bon gestionnaire de stress, il joue de tout son doigté pour transmettre de la détente.

 

A Cheveux Gris, rien d’impossible (rép.13)
Elle dit très justement aux collecteurs et chercheurs : bravo et merci ! Les sources récoltées et les choix de répertoire sont maintenant innombrables et riches. A nous de les travailler, de les arranger, de les vivifier en les jouant en public. Par sa réécriture elle parvient à changer en or des paroles d'antan à la misogynie de plomb, à ne pas copier de simples recettes de banale soupe, mais à les restaurer, puis les bonifier en les chantant. Faut-il encore composer pour créer en folk ? Discernement et esprit critique, pratiques réfléchies et diversité musicale en souplesse, telles sont ses attentes.

Quest. 8 Sur l'éclairage en bal, je suis partagé. En bal de jour, à la lumière naturelle, rien à redire. Pour nos nombreuses soirées aux néons "hangar du Nord" par contre, il y a encore beaucoup de progrès à faire. L'apport d'une lumière chaude, un peu tamisée même, permettrait aussi la vision fine vers les danseurs. Dans la salle même elle embellit les gens, ne bride pas les regards ni les rencontres ni n'empêche la séduction [bien au contraire]. Entre discothèque et entrepôt de série B, il y a un nuancier d'ambiances très diverses. Mais aussi un coût matériel et organisationnel assez sensible pour les budgets modestes du folk.

 

A Jacques : cuisine et dépendances… (rép.12)
Il dirait même pour surenchérir à « débutants, jouez lentement » (quest. 25) : qui va piano va sano et qui va diato va mollo; qui veut voyager loin ménage sa mesure; rien ne sert de courir, il faut jouer à point. Cent fois sur le clavier, il faut remettre l'ouvrage; travaillons, prenons de la graine; 10 % d’inspiration, 95% de transpiration.

Quest. 8 Tu joues mieux dans ta cuisine ? Fais donc un "bal à la maison". Et merci aux sonorisateurs, qui recréent parfois en scène avec tout leur talent les conditions de jeu propres à ton chez-toi.

 

A Gilles et Danyèle, auteurs et complices (rép.5)
Quand les alsaciens se passionneront un peu plus pour leur répertoire régional… les bretons danseront couramment des Zwiefacher et des valses à cinq temps. Ce n'est pas faute de savoir présenter de la bonne musique et animer de belles danses, pourtant. Rencontrer un public, le satisfaire, le fidéliser, la route est longue et la pente abrupte pour le faire croître et se multiplier. Travail de fourmis… mais toujours « dansez, maintenant », foi de cigales.

Diverses questions : Ah, Gilles, ne pas avoir à subir des (g)rognons, en maître du jeu, tranquille et joyeux sur ta chaise, écartant toute sublime soyotte, jouée à la cabrette, même avec un bon retour… c'est toujours mieux que d'endurer des questions à deux francs suisses.

 

A Aurélien, enfin retraité vers 2042 ? (rép.14)
L’énergie dégagée par les danseurs l'enivre, la vitesse l'emporte, gare à la contredanse.
Il n'y a que le premier pas qui coûte, y compris pour le noyau dur très technique du répertoire irlandais. Les standards et le jeu en groupe favorisent aussi ces ouvertures. En attendant d'avoir du temps pour les peaufiner une fois retraité…

Quest. 24 : D'ici 2042, la retraite pourrait ne débuter qu'à 75 ans et tu n'auras plus l'énergie pour jouer autant de suaves fins de bal… Ne l'attends donc pas en vain, suscite et saisis dès maintenant toutes les occasions possibles de jouer !

 

A Didier, qui aura dans les 135 ans en l’an 2111 (rép.4)
Puisse sa musique lui survivre à l’échéance de science-fiction dont il rêve sans garde-fou, émergeant des archives sonores pour un centième anniversaire de son futur 1er CD (?)
Créer, porter un morceau ou improviser avec qui le rejoint, cela fait partie de ses multiples plaisirs.

 

A Ronan, l’ami armoricain (rép 15)
Savourer l’instant en fermant les yeux, dans une salle intime, avec un public proche et à l’écoute, réactif jusqu’à en hurler de bonheur, dispenser et recevoir de bonnes énergies génératrices d'une saine sueur, entouré de musiciens aptes à échanger aussi sur d’autres univers, projeter des voyages aux quatre vents et dans les au-delà, jouer pour vivre et vivre en jouant dans la stimulation et la bonne émulation… Tu es tombé dedans tout petit, veinard…?!

Remarque  quest. 20 et 24 : ton temps de jeu potentiel est quasiment la durée rêvée du trajet imaginaire TGV direct Brest-Mulhouse, de l’Atlantique au Rhin. A quand une rame fest deiz / fest noz où tu jouerais ?